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Le 10 avril 2020 - Actu

Jean CAUCANAS - STECO
Responsable juridique - Associé
Cabinet STECO - LAGORD


Se relancer à la suite de la crise COVID-19 : focus sur les contrats

Les fermetures et perturbations économiques rendues nécessaires par la crise sanitaire du Covid-19 ont obligé un certain nombre d’établissements à demander à leurs bailleurs et fournisseurs des suspensions de paiements afin de protéger la trésorerie, élément déterminant de la survie de n’importe quelle entreprise.

Cette décision de gestion, importante, affecte le cours habituel des contrats et pose un certain nombre de questions juridiques. Théorie de l’imprévision et inexécution du paiement dans un contexte de force majeure sont les deux thématiques principales que l’on retrouve dans les débats juridiques pour justifier de l’interruption des règlements. Ces notions, complexes, dont l’application est voulue restrictive par la jurisprudence et dont l’usage survient dans un contexte totalement inédit, sont insuffisantes pour gérer l’insécurité juridique du nouveau monde dans lequel nous a fait basculer la crise sanitaire.

C’est pourquoi le Gouvernement a décidé par ordonnance l’interdiction de résilier les contrats de fourniture d'électricité, de gaz ou d'eau, pour cause de non-paiement de factures par un certain nombre de petites entreprises. Idem pour les loyers dont l'échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l'expiration d'un délai de deux mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire. Parallèlement le Gouvernement, conscient que la protection de la trésorerie des uns est la compromission de la trésorerie des autres, encourage le maintien des règlements d’un certain nombre de fournisseurs.

Ces ordonnances ne manqueront pas de poser de nouvelles questions, à la fois théoriques et pratiques, les possibilités juridiques de priver le bailleur de son loyer ou plus globalement un créancier de sa dette demeurant incertaines, à analyser au cas par cas.

Au-delà des débats juridiques, un constat pragmatique s’impose. La crise sanitaire a neutralisé les tribunaux judiciaires : les audiences ont été suspendues, et leur calendrier avait déjà bien été affecté par les mouvements de grève en lien avec la réforme des retraites. Les mêmes tribunaux traitent par ailleurs déjà difficilement des 50 000 procédures collectives annuelles, ouvertes en conséquence de faillites d’entreprise, dont le nombre va nécessairement augmenter malgré les mesures gouvernementales de prévention visant à les cantonner.

Aussi, le durcissement des positions, tant du côté créancier que du côté débiteur, mènera les parties à une impasse judiciaire, dont le délai de débouclage n’est pas encore connu, mais dont on peut prévoir qu’il sera long !

Une fois ce constat réalisé, une seule solution : négocier ! Plus que jamais, l’adage « mieux vaut un mauvais arrangement qu’un bon procès » a du sens. Créanciers, débiteurs, dialoguez sur le sujet des règlements, en lettre recommandée avec accusé de réception (modalité chère aux conseils vous permettant de vous ménager des preuves aussi bien à l’égard de votre destinataire que des administrations qui s’intéresseront à vos efforts de protection de votre trésorerie dans l’application des aides de l’Etat), mais aussi par des moyens plus cordiaux plus propices aux dénouements (appels téléphoniques), et soyez ouverts à un compromis que vous constaterez, si possible, dans un protocole écrit régulier et opposable. La phase de confinement, que nous n’avons pu anticiper, a été subie. Mettons à profit les temps qui viennent pour organiser la phase de reprise.